Les Petits maux d'amour

de Rose & Phil

 

Illustrations Elham Mbeygi

Texte Stéphane Théri

 

Votre rendez-vous avec l'insolite

et la singularité de toute histoire d'amour !

(8 Chapitres en lecture libre.)

 

Chapitre 1er

 

Comme un Parfum de connexion !

 

Ce soir là, la lumière dégagée par la Lune donnait au parc des Buttes-Chaumont ses attraits les plus romantiques. De concert avec la lune, la lumière jaune-orangée des vieux lampadaires, les ombres dansantes des buissons, les mouvements plus lourds et saccadés des grands arbres et le bal hasardeux des feuilles à jamais détachées par le vent d'automne en rajoutaient un peu et diffusaient sur toutes les allées du parc, une atmosphère particulière. Mais, ce n'était pas tout. Sur l'une des allées soufflait un vent encore différent, il y avait autre chose. Certaines nuits de certaines vies, les dieux du Ciel et de la Terre unissent leur volonté pour se jouer de l'humain. Ce début de soirée et ces traits de lumière diffus guidaient, d'une force invisible, deux êtres humains vers l'indicible, l'incommensurable légèreté que seules certaines rencontres peuvent enflammer. Derrière cette atmosphère feutrée se mettait sournoisement en place, un événement majeur.

 

D'après le mécontentement de Puffy, le chihuahua de Rose, tout avait commencé un peu plus tôt dans la soirée. Sa maîtresse ou plutôt les pas de sa maîtresse avaient été très vite empreints d'une nervosité dont il avait été, non seulement le témoin mais aussi la victime. Leur promenade de fin de journée n'avait, avant cette heure, jamais souffert du moindre couac. Ce soir là, il en était tout autrement. Après trois ans de vie commune sans accroc, cet incident sans gravité était-il être le premier d'une longue liste à venir? Ni lui, ni personne ne pouvait, à cette heure, le savoir.

 

Même si leur vitesse de croisière sur le trottoir de la rue Botzaris n'avait rien de comparable avec l'allure d'un TGV, ce fut quand même à grande vitesse qu'elle et lui avaient remonté la rue, le privant, pour le coup, de plusieurs arrêts pipi au pieds des réverbères qu'il affectionnait plus que tout et qui représentaient, avant ce soir, l'un des principaux attraits de sa promenade de fin de journée. Sacrebleu, mais où courait donc Rose?

 

Les allées du parc n'avaient pas échappé à cette précipitation toute nouvelle et, malgré le silence ambiant, avaient tout de même fini par livrer des informations de premier ordre. En effet, jamais avant ce soir, Rose et Puffy n'avaient effectué deux tours de parc. Lorsque ce qu'il croyait être leur dernier pas les avaient projetés, lui et sa maîtresse, devant le grand portail de la sortie, un coup de laisse soudain et immédiatement ressenti au niveau de son cou, fit comprendre à l'animal que leur promenade n'était pas encore achevée et que l'heure du repas n'avait pas encore sonné. Décidément, ce n'était pas sa soirée. Toutefois, il ne lui fallu pas attendre très longtemps pour découvrir le poteau rose ou le secret lié à l'envolée des pas de sa maîtresse et du soin tout particulier apporté, par celle-ci, à ce qui ressemblait plus à une tenue de soirée qu'à autre chose et qui était très loin de la tenue Sportswear de ses derniers jours. Cinquante mètres plus tard, l'arrêt brutal de leur évolution livra à Puffy la source de toute cette précipitation et à Rose un grand soupir de satisfaction. Comme la veille, l'avant veille et la semaine passée, le banc était occupé. C'était maintenant ou jamais.

 

Rose engagea presque immédiatement une kyrielle de petit gestes visant à effectuer un réajustement total de sa tenue d'apparat. Un geste très précis replaça son élégant chapeau pour l'harmoniser à la courbe de sa longue chevelure. Un petit coup bien calibré de ses deux mains sur son manteau découvrit sa robe, juste ce qu'il fallait. Il ne lui restait plus qu'à retrouver le pas léger d'un félin pour s'approcher jusqu'au banc et se planter devant cet inconnu qui, d'après elle, et ce qu'elle en avait vu lors de leur premier passage, n'avait pas encore fini de se perdre dans la lumière de son écran plutôt que de lever la tête.

 

Si Puffy n'avait absolument pas l'envie de se taper un troisième tour de parc, il en était de même pour Rose. Les escarpins, c'est bien pour danser ou aller à l'opéra, pas pour se taper des kilomètres à pieds. Trois mètres à peine la séparaient de l'homme et de cette lumière blanche qui tranchait un peu avec le jaune orangée de l'allée et qui, cela l'agaçait, semblait totalement l'absorbé. Le temps était à l'action. Une certitude s'imposait. Le parc allait fermer ses portes dans moins de dix minutes. Il fallait absolument bouger, provoquer une réaction capable d'arracher l'inconnu à son monde virtuel et le ramener à l'essentiel, Elle et tout ce qui en découlait.

 

Une semaine de shopping pour arborer la tenue parfaite, un tailleur vert émeraude, un chapeau de haute signature, un manteau au nacre flirtant avec élégance et retenue jusqu'à des escarpins que Cendrillon aurait vraisemblablement préféré, n'en déplaise à Monsieur Disney, à ses souliers de verre. Pas question de fuir, les douze coups de minuit étaient encore loin et Rose n'était pas de ces femmes qui se transforment ou qui ne s'assument pas devant les hommes. Elle était fermement décidée à provoquer les choses mais avec grâce et féminité. Elle sorti de son sac à main ce qui contenait peut-être l'arme fatale, cet atout majeur qui permet souvent à toutes ses congénères de créer l'émoi de nombreux représentants de la gente masculine.

 

Son passage aux Galeries Lafayette n'allait pas rester vain. Le kiosque de la maison Cartier et les essences florales de Panthère allaient sûrement, comme ses derniers pas de velours vers sa cible, porter l'estocade et souffler un vent délicat aux narines de Phil qui, dans la plus grande des hypocrisies et la plus féroce des timidités, attendait tout de la belle. L'écran commençait à lui brûler les yeux. Le banc avait fini de lui engourdir les fesses et le haut des cuisses. Les frimas de l'automne avaient depuis longtemps figé un peu ses lèvres et glacé ses épaules. Ces deux semaines à la regarder passer sans bouger, cet écran, principal alibi de sa présence assidue mais dénué de véritable intérêt, c'était fini. Le parfum de Rose, ses yeux et ses premières paroles projetèrent Phil dans le spectacle au combien romantique de cette rencontre du troisième type.

 

Qu'elle soit rousse, pleine ou en simple croissant, Phil avalait chaque mot de la belle inconnue et se sentait déjà prêt à décrocher la lune pour celle qui l'inondait de tout ce qui était elle et qui le soustrayait à tout ce qui n'était pas elle. Chassés avec politesse mais fermeté du parc par son gardien, Rose et Phil engagèrent ensemble la descente de la rue Botzaris. Le train, cette fois, beaucoup moins soutenu permis à Puffy d'arroser avec application tous les pieds de réverbères de la rue tout en offrant à chacune de ses haltes, un peu plus de temps encore à nos deux protagonistes pour se découvrir..

 

Chapitre 2

Comme une cerise

sur le gâteau !

 

Bien que les nouvelles technologies soient à même d’effacer la distance qui séparent deux individus, Rose n’en pouvait plus. Cela faisait maintenant cent soixante-cinq-mille-six-cents secondes qu’elle attendait le moment où elle reverrait Phil. Revoir Phil passait avant toute autre chose. Elle était déphasée. Ces deux derniers jours, la Terre avait bien évidement continué de tourner et de boucler en vingt-quatre heures sa révolution. Pour au moins une femme sur Terre, ce rythme de croisière était devenu trop lent. Rose n’en voyait plus le bout. Bien sur, il, y avait eu cette longue discussion téléphonique avec Phil, le lendemain même de leur rencontre mais, cela sonnait trop court à son esprit et déjà trop loin. Elle se posait des milliers de questions et rongée par son impatience, elle avait, ces deux derniers jours, mis un bon coup à ses biorythmes. L’émotionnel avait écrasé tous les autres. A quelques minutes seulement de son rendez-vous, ses allers et -retours sur le trottoir de la rue Botzaris en représentaient la plus belle illustration. Puffy n’avait encore jamais vécu ça. Sa maîtresse arpentait si vite le trottoir que sa laisse tirait à fréquence élevée et très irrégulière sur son collier jusqu’à, parfois, l’étrangler. Après la promenade interminable, Rose lui infligeait la ballade express. Le pauvre chien avait à peine le temps de lever la patte qu’il se retrouvait un ou deux mètres plus loin que le réverbère visé. Une fois, ça pouvait se pardonner mais là, visiblement, s’en était trop.  A des années lumière des préoccupations de son chien, la main droite sévèrement cramponnée à son téléphone, Rose livrait à Iris, sa meilleure amie, sa confidente et avec l’ intensité réclamée par ses émotions, la nature de son trouble. Elle répétait sans cesse les même mots : 

 

- Non, plutôt sa voix, c’est sa voix. Elle tape dans ma tête.

 

Elle ne tarissait pas d’éloges sur ses ressentis :

 

- Non, c’est sa voix, je te dis…….ça me prend aux tripes. Chacun de ses mots revient comme un écho et plusieurs fois….Oui ! J’ai hâte de le revoir….Non, je ne sais pas ce qu’il fait dans la vie. Je n’ai pas voulu lui sembler trop curieuse…Oui, il est un peu mystérieux mais pas très bavard. Il faut lui arracher les mots de la bouche. Par contre, je vais me répéter mais, à chaque fois qu’il a ouvert la bouche, je me suis sentie comme électrisée. Rien qu’à te le dire, j’en ai encore des frissons. C’est comme ça depuis deux jours. 

 

Rose ne tarissait plus de mots sur l’objet de toutes ses interrogations et ponctuait toutes ses phrases par un « J’ai hâte de le revoir ». Planté au pied du dernier panneau d’interdiction de stationner de la rue, elle ne se trouvait plus qu’à deux ou trois mètres de la porte d’entrée de son immeuble. Les passants allaient et venaient autour d’elle dans la plus grande des transparences. Happée par sa conversation téléphonique, elle ne les voyait tout simplement pas. Isolée, dans sa bulle, elle continuait de plus belle a livrer à sa meilleure amie toutes ses sensations. Au bout du fil, Iris avait, au tout début de leur conversation, essayé de placer une longue phrase puis, devant l’allant de Rose, avait vite abdiqué et limité ses intervention d’une suite d’interjections , toutes en phase avec le minuscule espace temps que lui laissaient les escadrons de révélations de son amie.  Rose accaparait avec passion, toute la conversation ou déroulait plutôt ce qui ressemblait plus à un monologue qu’à autre chose. Les passants s’activaient toujours à descendre ou monter la rue, qu’importe, Rose semblait seule, suspendue à son téléphone et au fil de ses interrogations. Le plus surprenant dans ce qui était entrain de se dérouler, dans ce morceau de vie, c’est qu’elle n’était même plus capable de visionner de mémoire le visage de Phil. Elle était comme qu’exclusivement obstinée par sa voix et tout ce que celle-ci provoquait chez elle. De son coté, le chien, presque étranger à toutes les émotions de sa maitresse, tournait aussi sen rond sans réussir à stopper leur mini farandole, devenue pour le coup, légèrement désagréable.  C’est l’horloge qui ramena brutalement Rose à l’heure universel et Puffy à ses derniers pas. Lorsqu’Iris lui demanda l’heure de son rendez-vous, elle pris soudain conscience qu’elle ne s’était toujours pas préparée pour son rendez-vous et balança en moins de temps qu’il en faut, sa copine, pénétra rapidement dans son immeuble, glissa son  téléphone dans la poche de son manteau et le chien dans la cage d’ascenseur. L’heure était à la splendeur… 

 

Toute la journée, Rose avait sillonné les grands magasins du quartier de l’Opéra et fait flamber sa carte bleue. Bien que l’exercice lui soit plutôt coutumier, elle avait mis le paquet et n’avait eu qu’une idée en tête, qu’une envie, trouver tout ce qui lui permettrait d’éblouir l’objet de toutes ses émotions, l’homme à la voix si singulière, celui qui semblait déjà devenir son Phil. Si tôt la porte de son appartement fermée, elle amorça à pas cadencés et presque mécaniquement, sa course vers la cuisine et ne fut pas surprise d’y trouver Puffy au pied de sa gamèle. L’animal l’avait comme tous les jours devancée. L’oeil hagard , il attendait le bruit libérateur du paquet de croquettes, preuve ultime qu’il pouvait encore espérer, après ces deux derniers jours de dysfonctionnement, un semblant de normalité dans le comportement de sa maitresse, à son égard. La vision de la rasade de croquettes balancée avec désinvolture mais adresse dans son bol rassura temporairement le chien qui bascula immédiatement dans ce qui devenait son urgence du moment, se sustenter. Rose quitta la cuisine. La lumière tamisée du salon affichait un ensemble de meubles de type colonial au milieu desquels trônaient deux gros fauteuils Churchill, un immense sofa Chesterfield et un superbe globe terrestre, aux tons abricot, sur un pied en bois d’hêtre. Tapissés rouge et or, les murs abritaient quant à eux une enfilade de portraits de cantatrices en scène. Rose traversa le salon à grands pas avant de regagner sa chambre. Tous ses achats de la journée se trouvaient là, étalés sur le lit et bien que très large, le king-size semblait débordé par toutes ces nouvelles toilettes. Les grands noms de la haute couture se partageaient l’espace avec harmonie. Après avoir effectué quelques assemblages, Rose opta pour le combo-pantalon asymétrique rouge en laine et soie. Elle l’enfila avec délicatesse et plantée devant son miroir, chaussa une paire d’escarpins décolletés en cuir, aux bouts pointus. La combinaison laissait ses bras nus et les cent millimètres de talon aiguille affinaient encore un peu plus sa silhouette. Elle se trouvait splendide. Elle l’était, indéniablement. Rose fit quelques pas jusqu’à son secrétaire et sorti de l’un de ses tiroirs, un collier croisé en émeraudes et diamants taille poire de la maison Graff. Elle le tenait de sa mère.  Certainement très cher à l’achat, ce collier avait à ses yeux une valeur plus importante encore voir même inestimable. En plus des éclats de ses diamants, ce collier reflétait tout l’amour que sa mère avait su lui prodiguer. A cette pensée, un léger frisson traversa sa colonne vertébrale. Les cinq millions de cellules sensorielles de sa peau témoignèrent elles aussi de ce fort moment d’émotion, trahies par la vague de frissons sur ses bras nus. Balançant tantôt à gauche, tantôt à droite, ses longs cheveux noirs, elle dégagea son cou pour le contempler de face et de profil. Puis, après s’être figée quelques secondes face au miroir, elle jeta un oeil sur sa montre. Il manquait deux tours de cadran à sa trotteur pour que celle-ci affiche vingt heures. D’un geste félin, elle prit en main son flacon de Panthère, l’élixir de Cartier et parfuma délicatement et tour à tour son cou et ses poignets. A cet instant précis, elle se sentait belle et prête.

C’est à vingt heures quinze exactement que l’interphone la plongea de nouveau dans un élan d’émotion forte. Ce n’était pas Phil mais un Taxi qui l’invita à descendre. Bien qu’accoutumée à un grand confort, elle fut impressionnée par l’intention de Phil. Il avait, pour l’occasion,  dépêchée une limousine. Rose se glissa dans la limousine. Le véhicule traversa une bonne partie de Paris avant de stopper sa course devant le numéro quinze du quai de La Tournelle. Phil se tenait là devant la porte du prestigieux restaurant La Tour d’argent; Une fois la limousine arrêtée, il se précipita vers la voiture, en ouvrit la porte et pris la main de Rose jusqu’à leur entrée dans les lieux. Sans un traitre mot, nos deux protagonistes se dirigèrent près d’une table dressée spécialement pour eux. Debout devant la baie vitrée, Rose resta un petit moment à contempler le panorama qui s’offrait à ses yeux, la Seine et Notre-Dame de Paris…

 

Très vite, leur conversation s’enflamma. Ils avaient tous deux mille questions à poser à l’autre. Unes farandole de mets tous aussi raffinés les uns que les autres ponctuèrent leur diner et leur conversation. Rose avait été un peu surprise par l’âge de Phil. Une fois son chapeau ôté, le front de ce dernier laissait, en effet, paraitre des rides bien prononcés qui ne manquèrent pas de piquer la curiosité de Rose. Phil décomplexé mais lucide lui avoua passé la cinquantaine sans oser demander à Rose le nombre de printemps qui la rendait si radieuse. Ce qui avait changé par rapport à leur première rencontre, c’était le rythme endiablé avec lequel Phil entretenait leur conversation. Bien avant d’avoir bu leur premier verre de Château Laffite, Rose avait pu constater à quel point Phil était bavard. Toutefois, elle avalait avec autant de plaisir, ses paroles que le vin sublime qu’on lui avait servi. Phil semblait presque chez lui et dû dire à Rose pourquoi ce restaurant et sa direction lui était aussi familiers. Il étala alors tout son savoir et savoir faire d’oenologue. Elle n’eut, quant à elle, que le plaisir offert par le déroulé des accords gourmands que Phil lui avait si justement proposé. Une seule chose perturbait Rose. Elle était là, face à cet homme de douze ans son ainé, elle appréciait son physique et le charme qui se dégageait de certaines de ses expressions. Pourtant, elle était à chacune de ses amorces de phrase, secouée par une réaction épidermique, immédiatement suivie par une multitude de flashs qu’elle ne comprenait pas. Le visage de Phil changeait à vive allure et elle se perdait dans ses hallucinations. Qui était-il vraiment ? Elle n’eut pas le temps de répondre à ses interrogations que Phil se leva. La lumière des lieux se tamisa légèrement et son compagnon de voyage, après lui avoir dévoilé sa passion pour l’opéra et le chant, pris le micro que le chef de rang lui tendit avec complicité pour interpréter la chanson « Smile » de Nat King Cole.  
Emue, bouleversée par cette prestation, elle remercia Phil et, devant la satisfaction de ce dernier, attendit un long moment avant de l’informer qu’elle était cantatrice. Phil qui pensait l’impressionner de toute sa voix, lâcha une petite moue de gêne avant de lui avouer qu’il était un grand amateur d’Opéra. Rose conquise par la soirée et toute la délicatesse de celui qu’elle ne voyait plus que comme un vieil éléphant solide et fragile à la fois, intrigué par toutes les sensations et les images produites par la voix de ce dernier, l’invita à venir à l’Opéra Bastille où elle allait se produire. Phil était tout aussi conquis que Rose mais en vieux pachyderme aguerri visait un petit plus avant ce rendez-vous encore lointain. C’est au pied de l’immeuble de Rose que Phil pu se plonger littéralement dans les bras de sa nouvelle conquête. Elle était à ses yeux, magnifique et son parfum n’en finissait plus de l’enivrer. Leur premier baiser fut long et langoureux. Puis, d’un pas beaucoup plus léger qu’à l’accoutumé, notre vieil éléphant s’engouffra dans la limousine avant de disparaitre. Le parfum de Rose l’imprégnait totalement. Seul dans cette grande voiture, il revisitait sa soirée, subjugué par la silhouette de Rose et l’esprit bien agité par  le décolleté et la poitrine généreuse de la belle. Elle aurait pu porter une rivière de diamants, arborer une forêt d’émeraudes que  cela ne l’aurait pas plus impressionné notre amoureux transit. Tout, il prenait tout, ses grands yeux noirs, sa longue chevelure et des courbes sur lesquelles il avait hâte de laisser ses mains et son regard vagabonder. De son côté, Rose bien que conquise allait vivre une nuit bien agitée.

 

 

Chapitre 3

Comme un cheveux

sur la soupe !

 

Leurs emplois du temps professionnel ne leur laissant que trop peu de temps dans le courant de la journée, l’élan amoureux transporta nos deux amants dans des discussions nocturnes interminables. Rose voulait tout savoir sur le passé de Phil et Phil voulait la questionner sur à peu près tout, ce qui donnait à leurs échanges des allures de rallye ou d’interrogatoires policiers.  Quinze jours s’étaient écoulés au rythme de leurs conversations téléphoniques et ils n’avaient pu se revoir qu’à deux reprises. Malgré l’acharnement avec lequel Phil avait essayé de plonger Rose dans son lit, la belle avait sut repousser toutes ses avances avec habileté et efficacité. Le vieil éléphant, c’est comme cela qu’elle le surnommait, était, d’après elle, trop pressé. Certes, le désir ardent de faire l’amour ne lui était pas étranger mais elle souhaitait attendre. Elle voulait être sur que cette aventure allait lui offrir plus d’un lendemain et pouvait également se construire avec son métier de cantatrice et tous ses déplacements. Phil, plus prosaïquement mettait cette vision prudente sur le compte de sa jeunesse et n’avait, dans son esprit, pas une minute à perdre. Son cinquantième anniversaire n’était plus très loin et même si Rose lui répétait qu’avec un amour sincère, ils avaient touts les deux, toute la vie devant eux, elle n’avait pas moins de seize ans de moins que lui. Et puis, merde ! Le corps de Rose affolait Phil. Elle était à ses yeux comme un grand champagne ou un grand cru. Difficile de garder cela devant soi sans vouloir consommer. Pour leur deuxième rendez-vous, ils avaient convenu de se retrouver près du banc ou Phil avait succombé aux fragrances de panthère. La maison Cartier avait jeter la première pierre de leur histoire d’amour mais avait fortement rendu Phil addict au cou de Rose. Se plonger dans celui-ci était comme une drogue et, lors de leurs étreintes, la belle avait toujours un peu de mal à le décoller. Phil semblait s’en mettre plein les narines, comme pour tenir jusqu’à la prochaine prise. Rose de son coté appréciait d’être blottie dans ses bras et de l’entendre murmurer des mots d’amour à son oreille.

 

En déplacement depuis le début de la semaine, ce vendredi soir sonnait pour Phil l’heure de la délivrance et pour Rose une charge émotionnelle plus forte qu’à l’accoutumée. Elle allait revoir l’objet de toutes ses visions et relever deux défis majeurs. L’opéra de Paris ouvrait ses portes pour la générale de Carmen et elle en était, pour la première fois, la cantatrice. De plus, elle avait invité Phil à l’évènement. Elle savait Phil féru d’Opéra et même si ce dernier n’avait pas la voix d’un ténor, se produire devant lui ajoutait un peu de pression. Puis, il y avait également toutes les visions nocturnes générées par la voix de Phil. Sans qu’elle ne puisse rien y faire, toutes les nuits, depuis leur première rencontre, Rose revisitait, durant son sommeil, les phrases de Phil. Plus troublant encore, à chacune d’elle, le visage de ce dernier changeait à la même allure que le lieux dans lequel ils étaient tous deux, sensés être. Ses visions étaient si fortes que Rose se réveillait en pleine nuit et n’arrivait plus à dormir. Pourtant, comme Phil, elle n’attendait que le moment où elle le reverrait. Elle avait d’ailleurs et à ce titre, parcouru les boutiques du quartier de l’Opéra, dépenser une somme substantielle pour arborer une nouvelle tenue assez belle pour surclasser son costume de scène et lui conférer une beauté sans pareil pour l’after qui serait peut-être ponctuer par ce que son vieil éléphant espérait et convoitait depuis déjà une semaine, une nuit d’amour. Rose n’était pas encore certaine de céder à la tentation mais souhaitait vivement attiser le désir de Phil. Il était prêt de quinze heures quand Rose partit pour l’opéra. Dans le taxi qui la menait du quartier des Buttes Chaumont à celui de l’opéra Bastille, elle fut bombarder de sms de Phil et d’Iris son amie, qui, elle aussi, serait présente ce soir. La lecture de ceux-ci fut interrompu par un appel qui crispa légèrement le visage de Rose. De l’autre coté du fil, c’était José, son impresario. Il était lourd, oppressant et d’après elle, toujours trop présent. L’animal ne la lâchait pas d’un semelle et se trouvait, pour notre cantatrice amoureuse, dans la catégorie des gluants dont il est toujours difficile de s’extraire. Mais José avait et tenait encore les clés de sa carrière et il lui était très difficile de l’envoyer sur les roses. Alors, elle subissait un peu sans rien dire mais attendait avec impatience le jour ou son aura lui permettrait de se débarrasser de lui. Pour l’heure, elle devait répondre à ses questions et agir un peu comme une personne non impliquée ou légère pour donner à José l’impression qu’il lui était indispensable.

Rose, au téléphone : « Non, je ne suis pas en retard. Je serai là dans quelques minutes….Non, je n’en ai pas besoin…..Non, je regrette mais je ne suis pas libre ce soir. J’ai déjà un diner de prévu.

 

Rose devait retrouver Phil et il n’était pas question que cela se passe autrement. Une nouvelle fois agacée par son gluant, elle raccrocha et plongea immédiatement son regard dans le fil de ses sms échangés avec Phil puis Iris et téléphona à son amie.

 

Rose au téléphone : «  Bonjour Iris, oui, tout va bien; J’ai bien reçu ton message. J’ai laissé ton invitation à l’entrée. Tu as juste à demander une enveloppe au nom d’Iris. Non, je ne pourrai pas t’attendre, je serai déjà en costume avec les autres membres de la troupe…. Non, non ! Mais, on se voit cinq minutes après. Tu peux même venir dans ma loge. Nous boirons le champagne et je te présenterai Phil…

 

Elle échangea un long moment avec son amie puis, arrivée à Bastille s’engouffra dans l’opéra à vive allure. De son coté, Phil se tenait debout au bar du TGV qui le ramenait sur Paris. Il était accompagné  de deux hommes qu’il avait invité à visiter les caves de l’un de ses fournisseurs de champagne. Les trois hommes absorbés par leur discussion ne se préoccupait ni du retard de trente minutes annoncés par le conducteur ni par autre chose que par la qualité, très bien mise en valeur par les mots choisis de Phil, du champagne qu’ils avaient dégustés un peu plus tôt, en fin de matinée. L’affaire s’annonçait belle pour tout le monde et donnait, en plus de son rendez-vous avec Rose, de la joie au coeur de Phil. A cette heure de l’après-midi, ni lui, ni Rose n’avait le moindre soupçons sur ce qui allait peut-être gâcher leur soirée. La trotteuse de leur montre offrait à la grande aiguille et avec une ponctualité sans reproche, la distance parcourue et nécessaire à la grande aiguille pour avancer et ainsi marquer le temps universel sans souci apparent. Très vite rendus à la gare Montparnasse, les trois hommes se serrèrent une franche poignée de mains avant de se quitter. Phil, enjoué par sa journée et son rendez-vous nocturne regagna le parking  d’un pas léger, s’engouffra dans sa voiture et prit la direction de Rueil-Malmaison ou il logeait. La représentation n’était qu’à vingt heures trente. Il avait suffisamment de temps pour rentrer chez, lui, se doucher est enfiler une tenue appropriée. Lui aussi voulait être impeccable et impressionner la belle Rose. Il se disait même qu’en mettant le paquet, il aurait le plaisir de gagner les faveurs de Rose et vivre avec elle, sa première nuit d’amour. Les dés de la destinée ne préviennent ,hélas, jamais personne des mauvais coups du sort. Avant l’heure, ce n’est pas l’heure mais, Phil, tout comme Rose, s’en approchait en toute innocence…

 

Alors que les musiciens de l’orchestre de l’opéra Bastille accordaient leurs instruments et procédaient à quelques révisions, Phil se pointa devant l’entrée, sans perdre de temps, tendit son billet et, impatient, gagna très vite sa place. Il était empreint d’une vive émotion et avait hâte de découvrir et d’entendre sa belle sur scène. La salle se remplissait à vive allure et de concert avec l’arrivée des spectateurs, le brouhaha ambiant et de circonstance prenait de l’ampleur. Iris fit de même quelques instants plus tard puis, un court mais intense silence engagea tout le monde dans les décors de l’opéra-comique de Bizet et la musique. Rose fit son entrée sur scène, sous les projecteurs, sous le regard ému et émerveillé de Phil mais en simultané, sous les applaudissements du public, d’Iris et en coulisses du gluant de José.

 

Phil comme les spectateurs et Iris, eut mainte fois l’occasion d’applaudir. Il le fit sans aucune retenue. Littéralement transporté par la prestation lyrique de sa belle, par sa beauté, notre amoureux transi n’avait qu’une hâte, retrouver Rose, la belle rebelle, pour la féliciter et la serrer dans ses bras.  La foule était dense et Phil mit quelques minutes à s’en dégager. Il se dirigea aussitôt vers les coulisses pour retrouver la loge de Rose. Elle lui avait laisser par sms un laisser passer. Après quelques pas et quelques indications glanées ça et là, il approcha du coin de la loge. Une ampoule grillée abandonnait une partie du couloir à une semi-obscurité. Là, stupéfait, il vit Rose dans les bras de José, l’impresario dont elle ne lui avait jamais parlé. Ce dernier en terminait avec un baiser volé mais que l’obscurité et la jalousie de Phil transformèrent immédiatement en geste de trahison.

Rose à peine dégagée des bras oppressant de son impresario ne tarda pas à comprendre la situation dans laquelle son gluant l’avait mise. Elle le mit en garde : « C’était la dernière fois. Tu m’entends, la dernière fois. » Puis, elle  courut après son vieil éléphant dont les pas semblaient être boostés par la colère.  C’est dehors, sur le trottoir déserté par le plus grand nombre que Rose et Phil se retrouvèrent...

 

Chapitre 4

Comme un air

de déjà vu !

 

Pour rejoindre Phil sur le trottoir et juste avant que ce dernier s’engouffre dans un taxi, Rose, faisant fi de la pluie et du sol glissant, avait battu tous ses précédents records de vitesse. En effet, malgré ses escarpins aux pieds, et l’avance prise par son vieil éléphant, la belle avait réussi à le rattraper, une poignée de secondes seulement avant qu’il ne s’engouffre dans un taxi. Même si la situation prêtait à confusion, elle n’avait rien à se reprocher et le cria avec toute sa voix de cantatrice mais surtout avec la gravité appropriée. Même si l’opéra se trouvait juste à coté, elle ne jouait pas.  C’était comme un pan de mur qui venait de s’écrouler à ses pieds. Même si leur romance ne se comptait à cet instant, qu’en quelques jours, l’édifice en construction s’était déjà payé la part du lion dans son ciel de vie. Alerté par ses cris, Phil tourna le dos à son taxi et laissa Rose s’exprimer avec un ton plus doux :

 

- Je te jure que je ne voulais pas. C’est un baiser volé, rien d’autre qu’un baiser volé. Je t’en prie, crois-moi. 

 

La pluie tombait de plus en plus fort et le cliquetis des gouttes d’eau sur le trottoir se faisait de plus en plus fort. Les yeux de Phil fixaient ceux de sa dulcinée, légèrement troublé par les gouttes de pluie mais aussi quelques larmes devenues, devant cette émoi, impossibles à retenir. Le chapeau de Phil laissait s’échapper quant à lui, un ruissellement qui venait s’ajouter à toute l’eau qui tombait déjà sur les épaules de Rose. Coupés du reste du Monde, indifférent à la forte averse, les deux amants se jetèrent l’un contre l’autre. Phil essuya délicatement le visage de Rose. S’en suivi un long baiser puis le temps pour nos deux protagonistes de regagner la loge de Rose. Littéralement assaillie par José lorsqu’elle avait quitté la scène, elle n’avait pas eu le temps de lire le message que Phil avait inscrit sur le miroir de celle-ci. A sa lecture, son corps fut pris de légers frissons, assortis presque immédiatement par une nouvelle étreinte et un baiser, en rien, moins romantique que la plus romantique des scènes de baisers hollywoodiens. Réconforté par la fébrilité de sa belle devant lui, le vieil éléphant n’en était pas moins rassuré. Il la serra un long moment encore contre lui avant de l’emmener dans l’une de ses gargotes où il aimait se restaurer. Sans en afficher plus sur son mépris pour le gluant de José, notre vieux pachyderme n’en pensait pas moins et allait oeuvrer pour éloigner Rose de ce prédateur. Si l’attitude de l’impresario avait jeté un froid sur la soirée, nos deux tourtereaux ne trainèrent pas très longtemps à table. Le regrettable malentendu provoqua, après la colère, une autre explosion. Pour le plus grand bonheur de Phil, Rose, après lui avoir ouvert ses bras, lui ouvrit la porte de sa chambre et son lit. Dans une frénésie partagée, les deux amants se jetèrent l’un sur l’autre avec douceur puis fougue. Leurs deux corps s’entremêlèrent très vite pour s’emballer et assouvir leurs besoins de fusion physique. Bien que légèrement recouvert d’une fine couche adipeuse, le corps de Phil était athlétique et les mains de Rose s’y promenaient avec adresse.  Rose semblait s’y être déjà abandonnée et flottait dans son esprit et pour la énième fois, cette sensation si particulière, si étrange. Son esprit, décalé de ses gestes d’amour, lui livrait des images semblables à leurs étreintes mais entrecoupées de différents visages. Phil quant à lui, restait dans le concret de l’instant et voulait donner à cette première nuit d’amour et de sexe, un parfum d’inoubliable. La belle ne lui refusa rien et livra son corps à toutes les envies de son amant. Elle fût même étonnée et heureuse que Phil soit si performant et si expert. Ses caresses comme ses vas-et-vient portèrent, à plusieurs reprises, Rose et son partenaire à l’orgasme. Leur première nuit fut longue et libéra du corps de Rose tous les sucs de l’amour pour la plus grande mais aussi la plus discrète des fiertés, ressenties par le mal en trans que fut Phil jusqu’au premières lueurs du jour. 

Aux aurores, le carnet de prospection de Phil sépara très vite nos deux amoureux. A la fenêtre de son salon, Rose esquissa un dernier sourire à son vieil éléphant béa et le regarda s’engouffrer dans son taxi. Sa tasse de thé à la main, elle revisita sa nuit mais aussi toutes ses visions. Une nouvelle fois encore, son corps fut empreint de frissons et son esprit intrigué. Cependant, ce qu’il y avait de nouveau résidait dans une vision plus nette que toutes les autres. Rose faisait l’amour à un homme que sa vie ne lui avait jamais donné l’occasion de connaitre. Le plus surprenant, c’est que cet homme avait une voix identique à celle de Phil. Les images alors se bousculaient dans son esprit et Rose se voyait encore avec deux ou trois hommes différents mais pour chacun d’entre eux, à la voix et au vocabulaire similaires à celui de Phil. Après un court instant d’arrêt sur images, Rose gagna sa salle de bain. Nue sous la douche , elle revisita sa nuit d’amour et laissa son corps s’inonder de la chaleur de l’eau et des frissons causés par les réminiscences de sa nuit et des mains de Phil parcourant son corps. Au souvenir des mains de Phil sur son entre-cuisses, la jeune cantatrice s’abandonna à quelques caresses intimes, resta un long moment sous le fil de sa douche puis engagea sa journée.
Son caractère indépendant et sa volonté de maitriser son destin et sa carrière lui imposèrent de mettre les points sur le I à son impresario. Elle décrocha son téléphone et pris le gluant à la gorge. 
Rose au téléphone : « Non ! Tu n’avais aucunement le droit de m’embrasser ou plutôt d’essayer de le faire comme tu l’as fait. Je suis sous contrat avec toi mais ce n’est pas un contrat de mariage.Il n’y a rien qui justifie ce que tu as fait hier soir, rien…Oui, j’ai bien entendu. Tu t’excuses mais pas moi. Je veux t’entendre dire que c’était la dernière fois….j’attends. »

 

Au bout du fil, le galant de José exprima avec une servitude de façade, ses regrets annoncés comme sincères mais reçus par Rose avec toutes les réserves du Monde. Ensuite, leurs échanges les ramena très vite à l’essentiel, le calendrier de cantatrice de Rose. Après l’Opéra Bastille, le public New-Yorkais  attendait la belle pour la fin du mois et elle se devait de préparer avec son gluant, ses rendez-vous presse, la réservation de son hôtel et de son vol.  

Le mois de novembre tirait à sa fin, la température glissait doucement mais sûrement vers le froid ce qui donna à nos deux amoureux une envie encore plus grande de se glisser ensemble sous une bonne couette. Malgré les turbulences occasionnées par la vie, les nuits torrides se suivirent avec le même engouement et des scènes de plaisirs inavouables mais vécues pleinement par Rose et son vieil éléphant. Puis Rose s’envola, loin de Phil,  pour la grosse pomme et pour donner une dimension internationale à sa carrière. Le Metropolitan Opéra et son public l’attendaient, la presse américaine aussi. La soirée d’ouverture généra un flot d’articles positifs sur les performance lyrique de Rose mais aussi un flot de vantardises de son gluant d’impresario qui recommandait à la coller avec un peu trop d’insistance. Un soir de décembre, le vol AF0006 d’Air France se posa sur le tarmac de l’aéroport international JFK de New-York. A son bord se trouvait Phil. Il n’avait pas supporté l’idée que sa belle puisse partir aussi loin de lui avec, à ses cotés, le gluant de José. Les révélations faites par Rose durant leurs longs échanges téléphoniques avaient largement attisé son inquiétude et l’avaient très vite convaincu de sauter dans le premier avion pour aller prêter main forte à sa dulcinée et qui sait,  l’engager à botter le cul du gluant si cela s’avérait être nécessaire.  Le temps d’un week-end prolongé, Phil débarqua avec enthousiasme sur les trottoirs de Manhattan et, marcha à pas gigantesques vers le Lincoln center. Avant de retrouver sa belle, Phil découvrit combien l’hiver pouvait être rude dans les rues de New-York. L’élégant chapeau qu’il portait n’empêcha pas le vent glacial de lui frictionner les oreilles. Mais, c’est bien connu, l’amour est plus fort que tout. Une seule chose comptait à chacun des pas effectués sur le trottoir et par la trotteuse de sa montre, retrouver Rose et la serrer dans ses bras. A son arrivée, Phil rencontra quelques soucis avec la sécurité mais ce fut très bref. Bizarrement et contre toute attente, l’objet de tous ses tourments, le gluant personnifié, l'auteur du baiser volé, l’impresario de tous les dangers vint à son secours et lui ouvrit les portes des coulisses. Un peu plus d'une heure plus tard, Rose et Phil laissèrent José derrière eux et se jetèrent dans un taxi, avides de découvrir, ensemble,  la vie nocturne newyorkaise.

 

Chapitre 5

Comme une âme

retrouvée !

 

Phil, comme un vieil éléphant ne se laissa pas longtemps chanter la pomme par José. L’impresario de sa dulcinée avait beau lui avoir rendu service en lui permettant d’investir les lieux ou sa belle se produisait, Phil n’avait toujours pas digéré l’épisode du baiser volé. A peine arrivé dans les coulisses, il posa sa main assez fermement sur l’épaule de l’impresario et lui balança avec fermeté : 

 

« Que ce soit bien clair entre-nous, je ne vous apprécie pas du tout. Ce qui s’est passé à Paris ne doit jamais plus existé ou alors…."

 

Le gluant lui coupa la paroles et lui rétorqua, d’un ton mielleux : "C’est un regrettable mal entendu, je vous assure que…"

 

Phil ne le laissa pas finir sa phrase et haussa le ton  :

 

« Stop ! Vous avez entendu, stop. Je ne veux plus vous entendre. Et je vais vous dire pourquoi. L’incident de la dernière fois n’était pas le premier. Votre insistance et vos gestes déplacés durent depuis trop longtemps. Alors, assumez ce que vous êtes et regarder."

 

Phil lui montra son poing et en vieil éléphant rompu à la concurrence, lui balança avec aplomb :

 

«  Encore un écart et je vous fout mon poing sur la gueule. Je crois…Non, je sais que Rose n’a pas manqué d’être claire avec vous. C’est terminé, vous m’entendez, terminé… »

 

Phil plaqua son interlocuteur au mur et les dents serrées mis un point final à leur conversation :

 

« Maintenant, je vais l’attendre dans sa loge. Si vous avez quelque chose à lui dire, bien évidemment, quelque chose de professionnelle, je vous accorde deux minutes, pas plus. Ensuite, pour éviter toute perte de temps, je n’ai pas du tout mais alors, pas du tout, envie d’aller prendre un verre avec vous ou pire encore, de diner en votre compagnie. Je vous laisse deux minutes et c’est déjà beaucoup."

 

Si l’impresario de Rose savait jouer les décideurs et les gluants devant toutes les femmes avec lesquelles il avait signé des contrats, il était à cet instant précis aussi effacé qu’un gamin qu’on aurait prit la main dans le pot de confiture. Une fois libéré de la contrainte imposée par Phil, il tenta en vain de se dégager. Phil le reprit de plus belle avec un ton toujours aussi ferme :

 

«  Je ne vous ai pas entendu dire qu’on était d’accord et j’en ai besoin. Je vous écoute. »

 

L’impresario s’exécuta puis, après avoir remis d’aplomb le col de sa chemise, disparu très vite dans les couloirs. Trente minutes à peine après cet incident, nos deux tourtereaux se retrouvèrent. La distance et la séparation n’avaient en rien affecté leurs sentiments. Après un long baiser et une étreinte, façon vieil éléphant transi d’amour, ils quittèrent l’opéra pour s’engouffrer dans une calèche. Emmitouflés dans une épaisse couverture, ils commencèrent, serrés l’un contre l’autre, le New-York by night et goûtèrent au calme nocturne des allées de Central-Park.  Cadencées par le claquement des fers des chevaux sur la chaussée, nos deux amoureux les paroles de Rose et de Phil s’enchevêtraient les unes dans les autres avec harmonie et leurs donnèrent, malgré le froid, la sensation que leur promenade avait été trop rapide. La calèche, sur les instructions de Phil, stoppa sa course à quelques dizaines de mètres du restaurant « Le cirque » où ils s’installèrent pour diner. Phil avait tout organisé et prit soin de réserver une table depuis Paris. Une coupe de champagne à la main, ils trinquèrent à leur amour avec des étoiles plein les yeux. Le vieil éléphant sorti alors de la poche de sa veste une enveloppe. Dans celle-ci se trouvaient deux billets d’avions pour Nairobi et un itinéraire détaillé de safari. C’est à ce moment précis que Rose fut subitement prise de violents frissons. A peine Phil avait-il fini de lui présenter ce projet de voyage que son corps tout entier fut comme happé par la force  des visions qui submergèrent l’esprit de Rose. Elle voyait un homme et une femme à la table d’un restaurant. Ni la femme, ni l’homme ne ressemblait à Rose ou Phil mais, fait stupéfiant, avaient tous deux des voix identiques. La femme que sa vison lui présentaient parlait comme elle, avec les mêmes mots. Des mots et des phrases totalement identiques aux derniers mots sortis de la bouche de Phil, sortaient de la bouche de l’homme qu’elle voyait. Phil constata pour la première fois le trouble de Rose. Même si l’incident ne dura pas une minute, sa violence fut telle que Rose coupa la paroles à Phil et le stupéfia par ses propos. Rose avec un ton et un rythme presque mécanique balança un escadron de mots très précis à Phil :

 

 «  Non, ne me dis rien de plus. Je sais exactement ou tu souhaites m’emmener. Nous partirons de Nairobi pour un vol en Montgolfière. Nous survolerons les plaines de Tsavo et le parc national d’Amboseli. Nous verrons au loin le Kilimandjaro et un troupeau d’ éléphants. Un peu paniquée par l’altitude, je sais que je ressentirais le besoin de me serrer contre toi. Je vois tout notre voyage Phil. Je ne sais pas comment mais, je vois tout un périple que je dois faire. Je vois une jeune femme et un homme un peu plus âgé, comme toi et moi. Toutefois, ce n’est pas toi, ce n’est pas moi. Par contre, ce sont nos voix à tous les deux qui me parlent. Je vois les lodges et aussi l’écriteau d’entrée du parc du Masai Mara. C’est tout simplement stupéfiant…"

 

Rose gardait les mains légèrement au-dessus de ses épaules et complètement habitée par ses visions, les déclinaient avec une précision qui laissa notre éléphant sans voix. Avant cette minute, il ne lui avait parlé de rien. Il n’avait lâché aucune information susceptible de donner à Rose la possibilité de découvrir avant l’heure ce qu’il souhaitait présenter comme une surprise totale. Notre vieil éléphant était tout simplement scotché, médusé par la véracité des révélations de Rose qui concordait exactement avec la feuille de route qu’il avait soigneusement préparée avec l’agence de voyage et dans une discrétion totale. De plus, il avait tout préparé la veille seulement de  son départ pour New-York. Il était impossible à Rose de. Savoir quoi que ce soit sur ce périple. Pourtant, la belle, comme envoutée, continuait de plus belle à tracer toutes les étapes de leur safari. Chacune d’elles était agrémentée d’anecdotes sur des moments privilégiés. Bien que littéralement absorbé par le récit, Phil eut lui aussi une vision. Elle ne faisait en rien appel à un phénomène paranormal mais le mis en alerte rouge. Il devait stopper son récit avant que celle -ci n’arrive au point culminant de leur voyage. Le vieil éléphant avait également ajouté une dernière surprise à ce voyage et celle-ci devait rester une surprise. Il décida d’interrompre brutalement sa dulcinée : 

 

« Rose ! Rose, qu'est-ce qui t’arrive ? Que se passe-t’il ? 

 

Chapitre 6

Comme une rencontre

du 3ème type !

 

Le diner de nos deux amoureux fut longuement perturbé par l’émoi avec lequel Rose contait et expliquait ses visions brutales. Phil l’écoutait à chaque bribe de récit sans trop savoir que dire ou faire. Tandis que sa dulcinée étalait à ses oreilles l’impensable, il était comme tantôt saisi par la curiosité, tantôt tiraillé par sa volonté de stopper coute que coute, le récit de Rose. La belle avait le visage marqué par l’interrogation et un peu d’angoisse. Son regard, de concert avec le va-et-vient de ses mains, un coup pointées vers le ciel puis l’autre sur le haut de sa tête, confirmait son trouble. Par delà cette scène semblable à une séquence de science-fiction, Phil, plus terre à terre voulait calmer sa belle, stopper sa frénésie d’interprétations sur, ce qui d’après lui, n’était peut-être dû qu’à un surmenage et une pure coïncidence. Dans tous les cas, penser cela, l’arrangeait un peu. Seulement, il n’était envisageable pour lui, d’avouer cela à Rose, s’eut-été comme la traiter de folle. Malgré le trouble provoqué par cette étrange situation, le vieil éléphant jouait une mi-temps dans chaque camp. Il essayait de réconforter Rose puis, une minute après, devant la déferlante de ses révélations, un peu dépassé, la renvoyait aux quelques jours qu’ils avaient à écouler ensemble avant de connaitre une nouvelle séparation de plusieurs semaines et lui demandait inlassablement de se calmer. 
Après avoir diner, nos deux amoureux quittèrent le restaurant pour le W hôtel . n’était pas très loin et une petite marche ferait du bien à Rose. Ils marchèrent lentement jusqu’à Time Square et flânèrent ensuite autour d’un verre au bar du W.
La performance artistique de Rose, les tracas générés par  ses visions et les trois martinis ingurgités par la belle, la conduisent très vite dans les Bras de Morphée et privèrent son vieux pachyderme de la nuit d’amour sur laquelle il avait fantasmé durant toute la traversé de l’océan atlantique. Si le décalage horaire n’avait en rien entamé ses ardeurs, il, n’eut pas d’autre choix que de s’abandonner, lui aussi, à sa première nuit new-yorkaise mais, dans son lit. 

Le lendemain matin, ce ne fut pas un baiser de sa belle qui réveilla Phil mais deux ou trois coups de langue de Puffy. Le chien de Rose accompagnait sa maitresse dans tous ses déplacements et avait pour l’heure, la vessie en alerte rouge. C’est comme ça, de corvée de pipi, que Phil engagea sa journée, par un tour de Central Parc avant de prendre un petit déjeuner avec celle qu’il ne voyait plus que comme sa promise. Même si le vieil éléphant avait les pieds bien ancrés sur les trottoirs new-yorkais, son esprit l’emportait déjà sur le sol africain où il avait décidé de demander sa belle en mariage. De musée en restaurant en passant presque tous les soirs par le sommet de l’Empire State building , nos deux tourtereaux retrouvèrent une vie amoureuse plus sereine. Même si les journées de Rose étaient quelque peu raccourcies par les répétitions et les représentations, il restait à nos deux amoureux suffisamment de temps pour découvrir les secrets de la grosse pomme. Il passèrent  de longs moments sur Soho, à visiter les boutiques de créateurs du quartier, ses magasins huppées et ses galeries d’art. Rose s’adonna à un shopping forcené pour revenir les valises pleines de nouvelles toilettes . Phil plus prosaÏque ne cessa de vanter la beauté et l’élégance de certaines façades d’immeubles, les ornements de fer forgé et le charme des rues pavées. La vie nocturne des new-yorkais leur apporta de très beaux moments, exception faite de la soirée passée avec la troupe de l’Opéra. Même si le gluant de José avait gardé distance et retenue, sa seule présence avait chauffé un peu les oreilles et l’humeur de Phil. 

C’est un baiser interminable qui sépara nos deux protagoniste dans le hall d’entrée de l’aéroport de Newark. Phil avait un carnet de commandes en souffrance et ne pouvait rester plus longtemps. Il quitta bien tristement sa belle mais avec une grande  satisfaction. Rose avait accepté avec joie et malgré ses troublantes visions de répondre oui au Kenya. Après quelques jours passés sans de nouvelles visions, elle avait fini par relativiser et laisser une part raisonnable au doute. Toutes ses visions n’étaient peut-être qu’une pure coïncidence et probablement que le fruit du hasard et de la fatigue liée à ses prestations de cantatrice. Elle quitta l’aéroport et son vieil éléphant, avec la même tristesse. Bien calé dans son sac à main, Puffy commença à gigoter, trouvant le temps des adieux un peu trop long. Elle s’engouffra très rapidement dans un taxi et regagna Manhattan. Tandis que Phil montait dans l’avion en direction de Bordeaux, la belle reprit le cours de ses investigations et de ses emplettes sur la cinquième avenue. 

 

Nos deux tourtereaux passèrent plus de trente cinq jours l’un sans l’autre, séparés par les milliers de kilomètres de l’Océan Atlantique et tous deux avides de se retrouver pour partir en safari. Leur nuits furent de nouveaux et quotidiennement entrecoupés de coups de téléphone interminables que le décalage horaire rendait un peu plus pénibles encore au vieil éléphant qui leur abandonnait des heures de sommeil. Non seulement ses nuits étaient courtes mais il devait également gérer les tourments de sa libido fortement enflammée par la voix de sa belle, au bout du fil. Mais, quand on est amoureux, la trotteuse de votre montre galope et celles de nos deux amoureux galopèrent jusqu’à les amener devant un nouveau hall d’aéroport, celui de Nairobi. L’heure était au safari et à la découverte des plaines kényane et de leurs immenses réserves. Le 4X4 transporta très vite Rose et Phil dans les interminables ornières des pistes de terre rouge. Comme sur certaines cartes postales, ils croisèrent durant leur premier jour des girafes, des phacochères, des zèbres  et bien d’autres espèces animales encore; Phil prêta une attention particulière aux singes aperçus dans le jardin de leur lodge, En effet, la couleur bleue des testicules du singe Vervet avait donné l’occasion à Phil de mettre en avant cette curiosité naturelle autour de laquelle, il ne tarissait pas de commentaires et n’en finissait plus de s’interroger.

 

Le soir, le spectacle nocturne d’un point d’eau le ramenait à la magie du sol africain et donnait à son périple la poésie dont tout le monde rêve. Sa dulcinée était collée à son côté et, ensemble, ils tutoyaient tous les dieux de la création avant de parcourir amoureusement le corps de l’autre, dans le calme et la chaleur de la nuit. Puis vînt le jour de l’envol. Rose et Phil, comme la belle l’avait vu dans ses visions et Phil programmé dans leur safari, montèrent dans une montgolfière pour survoler les plaines d’Amboséli. Une fois encore, la splendeur des lieux, le panorama offert par l’’altitude et la magie qui se dégageait de l’instant portèrent Rose et Phil au firmament des amoureux et au plus profond de la création. Blottie dans les bras de Phil, Rose en prenait plein les yeux et plein le coeur. Décidément, la vie, sa vie se présentait sous le ciel le plus romantique du Monde et pour le coup, son vieil éléphant se trouvait  être à ses yeux, l’instigateur de toute la magie ambiante. Les yeux de la belle, loin de la férocité animale, le dévoraient littéralement. 

 

C’est à Masai-mars, dans un village Masai que l’aspect sauvage de l’Afrique reprit la vedette à la carte postale. Un vieux lion se mit à courir à travers les manyattas (maisons traditionnelles masai), dans la direction de nos deux amoureux et d’un groupe de guerriers en pleine représentation de danse. Rose fut prise de panique et bien que moins démonstratif, Phil eut un moment la peur au ventre avant que tous deux ne découvrent que Clarence était inoffensif et courait juste vers le chef du village, celui qui l’avait recueilli alors qu’il n’était encore qu’un lionceau. Rose, très apeurée retrouva ses esprits dans les bras de Phil après une brève mais authentique coulée de larmes.  Hélas, la dissonance de l’incident provoqua chez la belle, de nouvelles visions et une crise bien plus forte que celle de New-York. Elle fut prise de tremblements et de soubresauts violents et se mit à délirer. Rose, dans les bras de Phil et dans un état second :

 

« Je sais maintenant pourquoi je suis ici avec toi. Je sais que tu vas mourir. »

 

Phil fut invité par le chef du village a porter sa belle dans l’une des manyattas. Les témoins de la scène pensèrent à cet instant, que le soleil avait peut-être trop taper sur la tête de Rose. Il n'en était rien.

 

Chapitre 7

Comme une complicité séculaire !

 

Le safari conduisit nos deux tourtereaux vers le sommet du Kilimandjaro et de merveilleuses soirées à contempler le couché si envoutant du soleil africain et l’arrivée d’animaux sauvages sur les différents points d’eau de leur itinéraire. Les visions de Rose perturbaient Phil quelques heures mais son amour était bien plus fort que les tourments causés par les révélations issues des délires de Roses. La plupart du temps, sa belle en oubliait la presque totalité et ne lui revenaient à l’esprit, une fois son calme retrouvé, que des bribes incertaines à son esprit.. Les lodges offraient tous de magnifiques panoramas et donnaient à leurs petits déjeuners une magie aussi enjôleuse que les soirées devant lesquels ils aimaient tous les deux contempler le spectacle naturel de la brousse dans de longs silences. Presque tous les jours, un petit  geste de la main de l’un ou de l’autre, magnifiait l’instant. Leurs deux mains se confondaient et leurs yeux laissaient un court instant l’Afrique pour offrir à leurs deux âmes quelques secondes d’émotions vives qui, à coup sur, s’inscriraient à jamais dans leurs mémoires  Ils savourèrent chacun de ses plaisirs simples avec une sérénité réparatrice et revinrent du Kenya plus amoureux encore….


Même si le déroulé professionnel de leur vie les ramena tous deux et dès leur retour sur Paris vers un rythme plus effréné, leur vie amoureuse se mit brusquement à l’accélération et tira un rideau sur les priorités d’hier.  Les mois s’écoulaient à une vitesse folle, les fêtes de fin d’année étaient proches et nos deux tourtereaux se brulaient mutuellement les ailes depuis un peu plus d’un an. Au grand damne de José, Rose refusa plusieurs contrats pour rester disponible et voyager avec Phil. Un matin, l’imprésario s’énerva  violemment après Rose: « Non ! Pour moi, ce n’est plus possible. Je ne peux pas continuer à dire non à tout ce que l’on te propose. Tu n’es qu’à l’aube de ta carrière et tu es entrain de tout foutre en l’air pour une idylle qui…

Rose très en colère ne laissa pas José terminer sa phrase : «  Arrête avec ça ! Tu sais très bien que le problème ne vient pas de Phil mais de ta jalousie et de ton obstination à toujours vouloir m’envoyer le plus loin possible de lui. Je n’en peux plus de toi et de tes contrats au bout du Monde. Je veux vivre, tu m’entends, vivre !!!

José lui coupa la parole : «  Tu dois chanter aussi, je te le rappelle…

Les bras en l’air, Rose lui coupa de nouveau la parole avec force : Oui, bien évidemment je dois chanter mais pas pour un maitre chanteur… pour un public et je veux choisir mon public. Je suis fatigué d’être à la merci de tes manigances.

José, outré : « De mes manigances, tu n’as pas toujours dis-ça, surtout quand tu n’étais encore qu’une illustre inconnue. 

Rose, de plus en plus en colère : « Vas-y, déballe tes inepties, fais comme si j’étais définitivement stupide. Tu crois que je ne sais pas que tu as refusé plusieurs scènes françaises sans m’en parler. Et puis, c’est moi qui t’es sorti de l’impasse. Tu as la mémoire courte ou sélective. Monsieur le grand impresario n’avait plus un artiste dans le coup quand je suis venu le voir la première fois. C’est moi qui suis venue vers toi avec un contrat, pas l’inverse. Tu n’étais plus rien et..

José, au bout de sa vie : « Tu ne connaissais rien du milieu et voilà que tu veux me donner des leçons. »

Rose, encore plus remontée : Oh que oui ! Je l’ai les écouté tes leçons et je t’ai également bien payé pour ton travail. Je ne te dois rien. Tu sais quoi, c’est fini. Mon métier offre du rêve au public, toi, tu me fais vivre un vrai cauchemar. Je n‘en peux tout simplement plus de toi. Notre collaboration s’arrête aujourd’hui, maintenant. C’est terminé, tu m’entends, terminé. 

Rose tourna le dos à son interlocuteur, attrapa d’un geste rapide son sac à main et ouvrit la porte du bureau quand José répliqua avec arrogance : « On ne me vire pas comme ça, moi. Nous avons un contrat, tu…

Rose ne le laissa pas finir. Sans même se retourner pour lui parler, elle lui balança avec mépris : « Tu sais où tu peux te le mettre ton contrat ? »  

Et, elle claqua la porte. 

De retour chez elle, Rose se prépara un thé et se fit couler un bain. Si le début de la ,journée avait bien mal commencé, elle pouvait se terminer dans la chaleur et l’intimité d’un diner avec Phil. Dans son bain, elle prit la décision de mettre sa carrière en sourdine quelques temps pour vivre pleinement les fêtes et pour le début de la nouvelle année, vivre son histoire d’amour sans contrainte. Elle allait commencer par l’achat d’un sapin et tout ce qui pourrait l’orner pour en faire un arbre étincelant. Ensuite, elle commencerait sa quête de cadeaux de Noël pour son vieil éléphant. 

Quelques jours plus tard, Phil lui annonça qu’ils étaient invités tous les deux à passer le réveillon du jour de l’an chez sa soeur Carla. Elle avait un chalet près de Combloux et Phil une très grande envie de skier ce qui ne fut pas pour déplaire à Rose qui, elle aussi, adorait la montagne et le ski. 
A peine débarqué chez Carla, Phil se fit planté par Rose, avec les valises et une multitude de corvées à accomplir pendant que Rose et sa belle soeur partirent faire du shopping sur Megève et parfaire ainsi à l’équipement de circonstance et la coquetterie si chère à sa dulcinée.  Toute la journée, Phil. Fut à la ramasse de ces deux nouvelles complices. Il ne put jamais en placer une tant et si bien que relégué à un simple rôle de figurant, il préféra chausser ses raquettes et engager une randonnée en solitaire. L’Arly et les pins lui offrirent  une belle ballade dans un silence de cathédrale. Il poussa sans trop de difficulté, jusqu’à Notre Dame De Bellecombe pendant que les femmes de sa vie jouèrent, sans lui, les pipelettes de haute volée. A son retour,  rien n’avait changé, enfin pour nos deux pipelettes. Phil avait avait abandonnée à la neige et à sa ballade son dernier souffle tandis que Clara et Rose affichaient une grande complicité  et un débit verbal à en avoir le tourni. Un peu fatigué par l’air et son escapade, Phil se tenait debout derrière elle sans dire un mot. Il était heureux que sa soeur et sa bien-aimée soient aussi complice. Après un ou deux verres devant la cheminée, nos trois protagonistes partagèrent une tartiflette et une quantité incommensurable de souvenirs dans une ambiance familiale et bienveillante. Malgré une envie toujours aussi forte de faire l’amour à Rose, Phil, aussitôt couché, tomba dans les bras de Morphée. 

 

Chapitre 8

Comme une chute incertaine !

 

Mise en ligne

Le 31 mars 2024 !